Tsonga: et après la victoire ?
Alors que Jo-Wilfried Tsonga et ses supporters nagent dans la joie d'une victoire mérité, cet article propose d'envisager la situation actuelle du français en regardant vers l'avenir.
Un joueur au zénith...
Voilà. Il l'a fait. Jo-Wilfried Tsonga vient de remporter le deuxième Masters 1000 de sa carrière, le premier hors de France. Il tient son onzième trophée entre ses mains, celui de l'Open du Canada. Sans doute, il peut en tirer de la fierté. Car son parcours était peut-être le plus difficile de tous ceux qu'il pouvait envisager lorsque le tableau fut publié. Sur le papier, seule la demi-finale aurait pu lui être plus difficile, si Wawrinka était parvenu à ce stade. Cependant, ce fut un autre top 10 qui le remplaça. Au final, quatre membre des tout meilleurs joueurs mondiaux tombèrent sous les coups de Jo “Mohammed Ali” Tsonga : Djokovic, Murray, Dimitrov et Federer. Trois d'entre eux étant membres de ce qu'on a appelé le « Big Four », cela représente une performance inédite.
... Peu avant le crépuscule.
Mais quittons l'euphorie, à présent. Aussi satisfaisant que ce titre et la manière dont il a été obtenu puissent-t-être pour les nombreux supporters de Tsonga, en France et ailleurs, il faut voir plus loin. Tsonga a, rappelons-le, 29 ans. Il est plus proche de la retraite que du début de sa carrière, c'est une litote. S'il veut atteindre les quelques objectifs, les quelques ambitions, les quelques rêves qu'il caresse en tant que joueur de tennis, il ne lui reste que peu de temps. Que peut-il espérer ? Et que pouvons-nous espérer pour lui ?
L'oeil du tigre vers la tournée américaine
A très court terme, il paraît peu vraisemblable que Tsonga remporte Cincinnati dans la semaine à venir. Seuls Agassi, Rafter, Roddick et Nadal sont parvenus à enchaîner l'Open du Canada et celui de Cincinnati. Et Tsonga n'en est pas à se comparer à l'un de ces joueurs, loin s'en faut. Toutefois, il serait risqué de dire que cela lui est impossible, au lendemain de son extraordinaire parcours à Toronto. Une chose est sûre, deux semaines avant l'US Open, son statut a complètement changé de dimension.
Un joueur de poids
Avant le tournoi, Tsonga pointait à la quinzième place mondiale. Désormais, il réintègre le top 10, et récupère en prime le titre honorifique de numéro 1 français. Un œil attentif remarquera, en étudiant le classement live, qu'il n'a qu'un écart très minime à combler pour dépasser Andy Murray, neuvième, alors que sa marge sur Nishikori, onzième, est confortable. Mais le classement le plus important est tout autre désormais : il s'agit du classement Race. On constate alors que Tsonga a un peu plus de 500 points de retard sur le huitième et dernier qualifié virtuel, David Ferrer. Mais ! Le dernier Grand Chelem de l'année n'est pas encore passé, et quand il le sera, on entrera dans la partie de la saison qui favorise le plus le jeu du français, avec le dur indoor.
Vers un baroud d'honneur ?
Être bien classé permet d'étoffer plus facilement son palmarès, c'est une évidence, et Tsonga a donc d'excellente chance de l'être bientôt. Il est surtout devenu un outsider crédible pour le titre dans les prochains tournois de la tournée américaine, y compris le plus important de tous. Le plus important demeure toutefois que son niveau de jeu est presque à son apogée, et que ses rivaux sur le circuit ne peuvent en dire autant : Nadal s'est mis en pause jusqu'à l'US Open pour cause de blessure, Murray n'a jamais été aussi bas au classement, Federer n'a pas affiché un niveau de jeu très impressionnant ni en finale, ni avant, Djokovic aurait la tête à sa vie de couple, Berdych est dans le creux de la vague, le jeu physique de Ferrer convient d'autant plus mal aux surface rapides que l'espagnol prend de l'âge, Dimitrov et Raonic n'ont toujours pas, à mon sens, atteint le maximum de leur potentiel.
S'il continue sur sa lancée et qu'il ne néglige pas sa préparation, Tsonga va avoir dans les mois à venir ses dernières et meilleures occasions de remporter un tournoi du grand chelem. Dès l'US Open, puis l'année prochaine avec l'Open d'Australie, où il a déjà brillé. Il a encore, grosso modo, et si les blessures le laissent en paix, une année où la pleine possession de ses moyens tennistiques se conjugueront avec un contexte suffisamment favorable. A partir du moment où il va falloir assumer les points pris, la dynamique changera, et risque de ne jamais se réinverser.