Paire et carré d'as
Paire passe au prochain tour de l'Open d'Australie. Déjà, cette seule phrase devrait nous mettre le cul par terre. Mais je ne critique pas du tout ni l'art ni la manière de ce Paire, alors que chez des énergumènes comme Kyrgios ou Fognini ça m'insupporte. Avec son éventail de coups, peut-être un des plus complets de la planète Tennis, chaque année il devrait être dans le Top Ten les doigts dans le nez.
Et bien sûr, c'est tellement commode de brandir l'épaisseur diaphane de son palmarès sur le compte de ses bris de raquette, ses insultes - souvent fondées - en direction du juge de chaise qui l'ont, de toute façon dans le nez, c'est tellement plus facile de ne pas saquer un Benoît Paire qu'un Djokovic, qui lui, mais au moins on en a les preuves, ne respecte rien. Ou de pointer du doigt sur son soi-disant m'enfoutisme dans les instants cruciaux, ceux où il perd pied par exemple et balance le match avec une espèce d'obséquieuse désinvolture qui voudrait dire à son opposant "gagne ton petit match à la con, de toute façon je t'emmerde" (je ne dis pas du tout que c'est ce que je crois qu'il pense).
J'adore Benoît Paire, quand il joue bien il joue excellemment et quand il joue moins bien, il se tape complètement du résultat, on dirait. Et je n'aime pas qu'on l'épingle pour le motif qu'on relève trop souvent du "rebelle", de l' "atypique", de l'inconséquent ou du rétif à tout, ce qui m'énerve au plus haut point. Je l'aime d'autant plus pour son jeu, cette fluidité fulgurante qu'il met dans tous ses coups pour peu que le vent tourne un peu en sa faveur, bref, son bagage technique dont tout le monde se fout, et dont personne ne parle vraiment.
Paire joue, et peut-être sans le savoir lui-même, à "qui perd gagne" et, fort malheureusement c'est lui qui gagne le plus souvent à ce jeu-là. Je ne dis pas ça pour le simple plaisir égoïste de faire un jeu de mots. Je déteste les jeux de mots. Moi il m'épate chaque fois, victoires ou défaites il a d'ores-et-déjà amplement réussi sa carrière. Qu'il tape un Dimitrov certes en bout de course (mais costaud sur ce match) prouve aussi certaines choses, qu'on connaissait déjà : talent naturel inouï, sautes de concentration peut-être mais une main, une vraie, qui me le feront toujours passer devant un Tsonga "allo maman je pleure j'ai trop mal partout" ou un Monfils "je suis le Will Smith du tennis et ça compte plus que les titres que je ne pourrai jamais glaner". Quand même, un gros bravo pour la Monphe, qui a l'air de bien s'en sortir, jusqu'à la prochaine défaite.
Pour en revenir à Paire, j'ai un respect immense pour ce qu'il est (ou semble être, je ne le connais pas), ce qu'il représente, et ce qu'il montre parfois sur le court, qui est tout proprement ahurissant de temps en temps, lui fait rêver, au moins ça bouge. Et ça ne patauge pas. Je suis presque sûr que dans sa tête il est zen au cube. Ma main à couper.
Philippe N.
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